16 Oct 2025
11 minutes

Pourquoi le club-deal immobilier séduit les entrepreneurs après une cession d’entreprise ?

Chaque année, plusieurs dizaines de milliers d’entrepreneurs français transmettent ou vendent leur entreprise. En 2023, selon l’INSEE, le montant global des cessions avoisinait 40 milliards d’euros. Ce capital libéré devient rapidement une question stratégique : comment le réinvestir intelligemment, sans diluer l’exigence qui a fait le succès initial ? Face aux solutions patrimoniales classiques, le décalage est souvent brutal. SCPI, assurance-vie, fonds bancaires... la promesse est lisible, mais la posture est passive. Pour des profils habitués à piloter, à arbitrer, à construire, ces véhicules semblent inadaptés. On ne passe pas de l’entrepreneuriat au placement de rente sans heurts. Le club-deal immobilier s’impose alors comme une alternative crédible. Il n’offre pas une promesse clé en main, mais une structure à gouverner. Il ne vend pas de rendement lissé, mais une trajectoire d’investissement précise, tangible, maîtrisée.
Théo Verhaeghe
Directeur du Développement
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Une approche exclusive et performante

Un couple rendement-risque attractif et maîtrisé

En 2024, les SCPI ont atteint en moyenne un taux de distribution de 4,72% (source ASPIM-IEIF). Ce taux est assez faible en comparaison avec le rendement des fonds monétaires, très sécurisés et liquides, qui a été d'environ 3,87% sur la même année (source Morningstar). Les investisseurs à la recherche d’une meilleure performance se rapprochent donc des opérateurs de club-deal qui réalisent moins d’opérations mais souvent plus qualitatives avec des performances d’au moins 7%.

Des opportunités souvent accessibles via des réseaux fermés

Il n’est pas simple d’identifier les différents opérateurs de club deal et d’accéder à leurs produits. Ils sont souvent réservés aux clients des banques privées ou des family office avec des tickets d’entrée importants.

Une implication claire, sans charge opérationnelle

La force du club-deal, c’est la clarté des rôles. Certes, l’implication des associés n’est pas quotidienne. Mais ils ne signent pas un blanc-seing non plus. Les grandes décisions – acquisition, financement, arbitrage – sont validées en comité. Les pactes d’associés fixent les règles : droit d’information renforcé, clause de sortie encadrée, pilotage à échéance.

Les reportings ne sont pas des bulletins de santé trimestriels. Ce sont des outils de dialogue. Ils permettent aux associés de suivre l’actif, d’anticiper les décisions à venir, et de rester dans une logique d’investissement stratégique.

Des structures juridiques au service de la stratégie patrimoniale

SCI à l’IS : capitalisation optimisée

La Société Civile Immobilière soumise à l’impôt sur les sociétés reste un outil privilégié pour ceux qui cherchent à faire croître leur capital sur le long terme.

Le régime de l’IS permet de déduire l’intégralité des charges d’exploitation, d’amortir le bien, et de ne pas imposer immédiatement les revenus au niveau personnel. Les dividendes peuvent être versés à une holding, bénéficiant d’un régime mère-fille, ce qui limite la fiscalité intermédiaire.

Ce choix implique une plus-value professionnelle lors de la cession de l’actif, calculée sur la valeur nette comptable après amortissements. Cette mécanique peut fortement augmenter l’impôt à la sortie si l’opération n’est pas anticipée. La SCI à l’IS est donc performante pour capitaliser, mais exige une planification fiscale dès l’acquisition, en tenant compte de l’horizon de détention et des perspectives de transmission.

SAS : flexibilité et transmission

La Société par Actions Simplifiée est plébiscitée pour sa souplesse juridique. Elle permet de rédiger un pacte d’associés sur mesure, d’organiser librement la gouvernance et de moduler les droits économiques (dividendes, plus-values).Sur le plan fiscal, la SAS est soumise à l’IS par défaut.

Cette structure est particulièrement adaptée dans une logique de transmission : les actions peuvent être données avec abattements, les clauses statutaires facilitent l’entrée progressive d’héritiers ou de partenaires, et les montages via démembrement de titres sont aisés.

Elle est aussi compatible avec des montages plus sophistiqués, comme l’émission d’actions de préférence ou la mise en place de clauses de liquidité à échéance fixe.

SLP : inspiration private equity

La Société de Libre Partenariat reprend les standards des fonds professionnels d’investissement, mais appliqués à l’immobilier. Elle distingue les commandités (gérants responsables indéfiniment) et les commanditaires (investisseurs passifs au risque limité à leur apport).

Son intérêt principal réside dans la flexibilité contractuelle : répartition asymétrique des résultats, clauses de distribution différée, intégration d’investisseurs étrangers avec fiscalité avantageuse selon les conventions bilatérales.

La SLP est particulièrement pertinente pour des opérations multi-actifs ou transfrontalières, ou lorsque le véhicule vise à lever des fonds auprès d’un cercle d’investisseurs avertis. Elle est moins utilisée en patrimoine familial pur, mais devient un outil stratégique pour mutualiser des projets complexes nécessitant des apports importants et un cadre réglementaire allégé par rapport aux OPCI ou SCPI.

Holding et régime mère-fille

Il peut dans certains cas s'avérer pertinent d’intercaler une holding entre l’investisseur personne physique et les sociétés propriétaires des actifs immobiliers. En effet, si la holding et ses sociétés filiales sont soumises à l’IS, les dividendes versés par les filiales à la holding bénéficient d'une exonération presque totale de fiscalité. Seuls 5 % des dividendes perçus par la holding seront soumis à l'impôt.

En l'absence de ce régime, les dividendes versés par les filiales à la holding seraient intégralement soumis à l’IS. Selon le régime de droit commun, les dividendes seraient imposés au taux réduit de 15 % jusqu'à un bénéfice de 42 500 €, et à 25 % au-delà (pour l’année 2025).

Ce régime constitue un puissant levier fiscal. En permettant des économies fiscales importantes lors des remontées de dividendes à la holding, il offre une capacité de réinvestissement bien plus importante. Les dividendes peuvent être réinvestis par la holding dans d'autres sociétés. Ce mécanisme favorise ainsi l'expansion et la diversification des activités du groupe, tout en optimisant la gestion des ressources financières.

Lorsque l’investisseur personne physique souhaite remonter l’argent de la holding, les  dividendes sont alors soumis au prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 % ou, sur option, au barème progressif de l'impôt sur le revenu (IR) après un abattement de 40 %.

SCPI, co-investissement direct, club-deal : des modèles, des limites

Le trio SCPI / co-investissement / club-deal ne répond pas aux mêmes logiques.

La SCPI propose une mutualisation extrême. Le ticket d’entrée est faible, souvent dès 1 000 €. L’investisseur accède à un portefeuille d’actifs gérés, sans transparence granulaire. Le rendement net a chuté, sous les 4 % depuis 2023, et la liquidité reste théorique : la revente des parts dépend de la demande secondaire.

Le co-investissement direct, à l’inverse, demande un ticket élevé, souvent au-delà de 500 000 €. Il suppose de tout piloter : sourcing, travaux, financement, gestion locative, fiscalité. Le potentiel de création de valeur est fort, mais les risques de concentration, d’erreurs ou de surendettement sont réels.

Le club-deal immobilier, lui, joue l’entre-deux. Il mutualise l’actif à l’échelle d’une foncière dédiée, souvent entre 10 et 30 investisseurs, avec un ticket moyen entre 200 000 et 400 000 €. L’actif est connu, le plan détaillé, la gouvernance partagée. Le rendement dépend de la stratégie, mais les TRI ciblés tournent autour de 8 à 10 % nets à 10 ans.

Création de valeur : trois cas concrets, trois typologies

À Bordeaux, un locataire informe son bailleur de son souhait de quitter l’immeuble de bureaux qu’il occupe en totalité. Le marché locatif étant compliqué avec plus d'offres que de demandes, le bailleur change de stratégie et s’oriente vers la vente à utilisateurs. L’immeuble est revendu libre de toute occupation le lendemain de sa libération à une PME locale. Résultat : une vacance évitée et une valorisation augmentée de 32%.

À Châlons-en-Champagne, un entrepôt logistique est libéré par son locataire. Le bâtiment est reloué à un locataire avec un engagement ferme de 6 ans et un loyer annuel en hausse de 15%. La valorisation bondit après la signature du bail et le propriétaire décide de mettre en vente pour capter le maximum de la valeur. La plus-value est de 18% et le TRI global de l’opération ressort à 14%.

À Orléans, un locataire situé au centre d’un ensemble commercial loué à 3 locataires décide d’arrêter son activité actuelle et propose au propriétaire de rester locataire pour y développer une franchise alimentaire. Le bailleur accepte en contrepartie d’un meilleur loyer qui reflète la valeur locative de marché. Le rendement locatif pour le SCI augmente de 100 points de base.

Ces opérations n’ont rien d’exceptionnel. Mais elles nécessitent un plan. Et une stratégie d’Asset Management.

Risques : les assumer, les encadrer, les intégrer au plan

La promesse du club-deal n’est pas une garantie. L’horizon est long, souvent 8 à 12 ans. La liquidité est verrouillée pendant toute la phase de détention. Les clauses de sortie ne s’activent qu’à certaines échéances, souvent sous conditions de prix ou de substitution d’investisseur.

Le risque locatif est réel : un bail peut être dénoncé, un preneur peut négocier à la baisse son loyer, un bâtiment peut nécessiter des travaux imprévus. La hausse des taux, depuis 2022, a également pesé sur certains refinancements intermédiaires, réduisant la marge attendue.

Mais les mécanismes de couverture existent : instruments de couvertures de taux, marges budgétaires anticipées, garanties locatives, phasage des travaux, stress-tests en amont. Un club-deal ne protège pas contre la conjoncture. Il structure la manière d’y réagir.

Effet réseau : un levier intangible mais puissant

Un aspect souvent sous-estimé du club-deal, c’est la qualité du cercle d’investisseurs. Entre dirigeants cédants, entrepreneurs en diversification ou familles patrimoniales, les échanges dépassent le seul actif. Certains co-investissent à nouveau ensemble. D’autres échangent des opportunités. D’autres encore partagent des conseils juridiques, fiscaux, ou industriels.

Ce réseau discret, formé autour d’un actif commun, peut devenir un levier d’enrichissement collectif. Pas uniquement financier. Stratégique aussi.

Investir avec discernement après une cession

Le club-deal immobilier n’est pas une formule universelle. Il demande du capital, du temps, une capacité à comprendre les cycles longs. Mais pour les entrepreneurs qui ont vendu, qui refusent de placer leur patrimoine dans des solutions toutes faites, il représente une voie cohérente.

C’est une manière de rester dans l’action sans redevenir opérateur. De choisir ses partenaires. De suivre ses investissements avec méthode. De bâtir, encore mais autrement.

Le club-deal n’est pas un produit de rente, ni un produit d’épargne. C’est un format d’investissement pour celles et ceux qui veulent continuer à donner du sens à leur capital. Et en maîtriser le déploiement.

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*Les informations présentées dans cet article sont fournies à titre purement informatif et ne constituent ni un conseil en investissement, ni une recommandation d’achat, de vente ou d’arbitrage.L’investissement en club deal ou en private equity immobilier comporte des risques spécifiques, notamment un risque de perte en capital, un risque de liquidité et un horizon d’investissement long terme.Les performances passées ne préjugent pas des performances futures et ne sont pas constantes dans le temps.Avant toute décision d’investissement, il est recommandé aux investisseurs de se rapprocher de leurs conseils financiers, juridiques et fiscaux afin de s’assurer de l’adéquation de l’opération à leur situation patrimoniale, à leurs objectifs et à leur profil de risque.